Social business et initiatives citoyennes : deux modes d’institutionnalisation pour quelle innovation sociale ?

Sociologie. Université de Lorraine, 2022

Antoine Perrin, 2022

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Résumé :

Cette thèse est consacrée à l’étude sociologique de processus d’institutionnalisation de nouvelles initiatives qui proviennent d’acteurs de la société civile et qui visent à répondre à des problèmes publics. D’un côté, le social business développé par le récipiendaire du prix Nobel de la paix Muhammad Yunus. De l’autre, des initiatives développées par des citoyens sur leur territoire. Une étude des sources du social business et de son bilan, et une enquête sur le terrain dans l’Est de la France auprès d’initiatives citoyennes dans le domaine de l’alimentation (AMAPs, jardins partagés, restaurant solidaire, ferme urbaine…) permettent de conceptualiser leurs modes d’institutionnalisation. Le premier modèle apparaît comme vertical et compatible avec le cadre du néolibéralisme, tandis que le second conteste les compromis sociaux et économiques en place. Ces deux manières d’aborder capitalisme et action publique entraînent deux résultats en termes d’accès aux arènes publiques. Il s’en suit une hégémonie du social business au niveau mondial auprès des médias et des institutions internationales et une invisibilisation ou une tentative de contrôle des initiatives citoyennes par les institutions locales comme les collectivités publiques. Notre recherche montre les mécanismes par lesquels ces deux modèles sont respectivement soit portés aux nus, soit encadrés voire disqualifiés, selon leur réponse aux problèmes publics. La notion d’innovation sociale est ambivalente. Utilisée par la recherche en économie sociale et solidaire notamment, elle qualifie le produit de certaines pratiques au sein d’initiatives souvent non-étatiques et la manière de les analyser. Perçue comme positive par les acteurs de terrain et notamment les pouvoirs publics, elle peut devenir une boîte noire. Nous l’avons choisie pour analyser les matériaux récoltés durant cette recherche, et en retour, nous utilisons notre terrain pour questionner cette notion. Le social business peut être analysé comme produisant une innovation sociale faible ; ce dispositif repose sur des mécanismes traditionnels (marché, offre et demande, concurrence, philanthropie). Tandis que les initiatives citoyennes étudiées peuvent correspondre à une innovation sociale dite forte ; elles mettent en question ces mécanismes pour les discuter au sein de collectifs ouverts et offrent un terrain d’expérimentation de la démocratie au sens politique et économique.

Sources :

theses.hal.science/tel-03768028v1