Loos-en-Gohelle, l’exemple français du développement durable construit par les citoyens

Le Labo de l’ESS, décembre 2015

Ancienne petite ville minière du Pas-de-Calais, Loos-en-Gohelle s’est engagée depuis une vingtaine d’années, avec et pour ses habitants, dans la construction d’un territoire qui tente de répondre aux exigences du développement durable. La ville démontre que l’implication des citoyens permet l’innovation.

Conscients des urgences croissantes auxquelles est confrontée notre société, que ce soit dans les domaines écologique, économique et social, les élus ont souhaité réorienter le modèle de développement actuel. Loos-en-Gohelle est aujourd’hui la preuve qu’en travaillant ensemble, territoires et citoyens peuvent construire une politique de développement du territoire partagée et portée par tous.

En l’espace de trente ans, la ville de Loos-en-Gohelle est parvenue à renverser son destin. Ancien bassin minier, la fermeture de la dernière mine en 1986 a plongé la région toute entière dans une profonde crise. Effondrement de l’économie, séquelles environnementales, délitement social, autant de vestiges d’un passé non durable qui ont fait de Loos-en-Gohelle une des villes les plus pauvres de France. Considérant dès lors la commune comme un écosystème complexe (naturel, patrimonial, humain et culturel) les élus ont choisi de s’orienter vers une politique de développement durable volontaire et orientée vers une reprise en main de leur destin par les habitants, un modèle qui permette à chacun de trouver sa place dans la ville.

Dès le départ les élus ont eu le réflexe d’impliquer les citoyens pour plus d’efficacité.

La participation, moteur de citoyenneté

Á Loos-en-Gohelle, la transition écologique ne s’est pas imposée aux Hommes mais elle est le résultat d’une concertation qui en met en regard les besoins des habitants avec les défis d’une société dont le mode de développement a été mis en échec. Jean-François Caron, d’abord conseiller municipale délégué à l’aménagement du territoire et à l’environnement de Loos-en-Gohelle en 1995, puis maire de la commune depuis 2001 a instauré au fil des années une véritable démocratie participative basée sur un principe d’écoute mutuelle et d’implication des habitants dans les décisions qui engagent la ville. Ce lien très étroit entre les citoyens et la municipalité a permis de développer une confiance réciproque au sein de la commune mais aussi un sentiment de fierté d’appartenance à cette ville. En reconnaissant aux habitants leur expertise d’usage de la ville, les élus leur ont permis de sortir du statut de consommateurs de politiques publiques pour en devenir des coproducteurs.

Des dispositifs mis en place par la commune

Peu à peu, la ville s’est mise à fonctionner comme une agora et la concertation a été systématisée, quel que soit le sujet traité (jeunesse, sécurité routière, Charte du Cadre de vie, etc). Ainsi, l’ensemble de la population s’est vu régulièrement invité soit à participer à des projets communaux, soit à s’exprimer sur ces derniers. Désormais bien ancré dans l’ADN de la ville, le terme de « forum local » désigne ce dispositif de concertation-participation favorisant l’action des citoyens et la coproduction de la décision publique. Á titre d’exemple, entre 2001 et 2008, plus de deux cents réunions publiques de concertation ont été organisées. Le forum local a pour vocation de permettre l’égalité des citoyens, y compris les plus démunis, à la discussion démocratique. Dans cette optique, la parole donnée aux Loossois permet de déclencher un processus de travail collectif afin d’élargir la réflexion.

C’est ainsi qu’un chantier sur le réseau d’assainissement d’une rue de Loos-en-Gohelle s’est transformé en renouvellement participatif de tout l’aménagement urbain. Des réunions publiques sont organisées durant lesquelles sont décidés le réaménagement des zones de stationnement, l’aménagement d’un espace partagé piétons-cyclistes en site propre ou encore le fleurissement de la rue. Ce qui était au départ un simple projet d’assainissement, s’est ainsi transformé en enrichissement de la biodiversité et de la beauté de la ville.

En 2010, la naissance du programme « fifty-fifty » renforce cette dynamique. Le principe est simple : la commune soutient financièrement et techniquement un projet souhaité par un groupe d’habitants ou une association, mais la réalisation est effectuée par les demandeurs. Par exemple, la commune fournit les jardinières et les fleurs aux habitants qui souhaitent améliorer le fleurissement de leur rue, puis les habitants se chargent eux-mêmes de l’arrosage et de l’entretien. De la même manière, la ville finance en partie le coût des permis de conduire des jeunes en échange de quelques travaux d’intérêts général. Ce rapport gagnant-gagnant crée une réelle synergie entre les Loossois et la municipalité.

Information du public, prise de conscience individuelle des enjeux et évolution collective du jugement sont les trois vertus de la participation citoyenne à Loos-en-Gohelle. L’implication de la société civile y est aujourd’hui très forte à Loos-en-Gohelle, preuve en est l’explosion du nombre d’associations qui a doublé depuis les années 1980 : plus de 200 pour 7 000 habitants. Si le monde a désormais les yeux rivés sur Loos-en-Gohelle, c’est pour sa politique de développement durable innovante. L’implication citoyenne est le facteur clé de sa réussite.

Sources :

Site du labo de l’ESS www.lelabo-ess.org/?Loos-en-Gohelle-l-exemple-francais